Comment délivrer les meilleurs services d’infrastructures managées ?
Introduction
Parmi les nombreuses activités dans le domaine de la Tech que j’ai eu l’occasion de pratiquer ces 24 dernières années, les services managés ainsi que les infrastructures managées sont probablement celles que j’ai exercées le plus intensément sous de multiples formes, aussi bien en tant que prestataire que comme conseil pour d’autres acteurs du domaine que j’ai accompagné.
S’il s’agit d’un marché toujours en croissance, le taux de satisfaction réel moyen du client n’y est pas particulièrement élevé alors que, dans le même temps, sont annoncés des taux de contentement en apparence souvent assez importants (fréquemment entre 95 et 98%) : ces valeurs sont trompeuses, j’y reviendrai un peu plus tard.
Pourtant, la grande majorité des entrepreneurs de ce secteur comme leurs équipes y mettent de la bonne volonté et ont l’impression de faire de leur mieux pour satisfaire leurs clients.
Malgré ces efforts, et bout de quelques mois ou années, il n’est cependant pas rare de rencontrer un niveau d’agacement partagé entre le prestataire et client. Parfois, ce ressentiment grandit, et va jusqu’à voir s’installer un mépris cordial… ou pas entre les parties. Néanmoins, la plupart vous diront que ce pourcentage est dérisoire et n’est pas représentatif de la qualité du service fournit. Si c’est ce que vous pensez, avez-vous déjà sondé par voie de tiers et en profondeur l’avis réel de vos clients à votre égard ?
Je l’ai fait pour vous, et les retours sont édifiants : la réalité est bien plus sombre et de nombreux clients n’osent tout simplement pas s’exprimer par peur pour leurs infrastructures et leur business (oui, vraiment, et le comportement encore en 2024 de certains prestataires peu scrupuleux reste un vrai sujet). L’avis de vos insatisfaits qui s’expriment, est en réalité une métrique bien plus importante qu’il n’y parait et qui peut faire toute la différence.
Mais, alors, d’où provient ce décalage de perception entre les fournisseurs et les clients ?
Ce que m’a appris mon expérience de plus de 24 ans dans ce métier, c’est qu’il existe la plupart du temps plusieurs raisons à cet état de fait : et si toutes peuvent être réglées, certaines le seront plus facilement que d’autres. Je vais vous parler ici de la plus importante à mes yeux, la raison fondamentale sur laquelle tout repose : la perception.
Le problème de la perception
Cela peut paraître incroyable, néanmoins beaucoup d’acteurs du secteur ne perçoivent pas correctement le fondement de leur propre métier.
Ainsi, pour la plupart, ce dernier consisterait à délivrer et maintenir en conditions opérationnelles des infrastructures en lieu et place du client, au travers d’une délégation partielle ou totale de son administration.
C’est la promesse qui est faite aux clients et le plus souvent, avec plus ou moins de succès si on s’en tient uniquement aux éléments contractuels. Les critères comparatifs utilisés relèvent, en effet, majoritairement, des domaines technique, contractuel et juridique : fonctionnalités, outils, tableaux de bord, support, suivis, versions supportées, monitorings, garanties de temps de rétablissement, SLA, certifications, etc.
Ces mêmes acteurs subissent dans le même temps et au gré des évolutions technologiques et des tendances, de profonds changements qui affectent leur « business model, » et nécessiteraient régulièrement : restructurations, investissements et adaptations.
Mais, alors, si la promesse est tenue, quel est le problème ? Le problème est que malgré le respect du « cahier des charges » et du contrat, un sentiment subjectif d’insatisfaction apparait, lié notamment à la perception erronée des parties sur l’objet réel, non-dit et pourtant attendu de la prestation.
Retour à la réalité ?
Vous avez maintenant deux choix qui s’offrent à vous :
1) vous prenez la pilule bleue, et vous arrêtez de lire cet article maintenant. Vous pourrez rester dans l’ignorance satisfaisante de cette réalité que vous vous êtes fabriquée : aucune vérité dérangeante ne devrait venir perturber votre petit univers.
En effet, s’agissant actuellement d’un marché en croissance, votre business ne devrait pas s’effondrer pour autant et continuer sa progression ou a minima maintenir son activité durant au moins encore plusieurs années.
Notez toutefois que le temps passant, le risque s’accroit de voir votre client assimiler chaque jour un peu plus votre relation à celle d’une lame de couteau placée sous sa gorge, plutôt qu’à celle de deux parties obtenant chacune de l’autre ce qu’elle souhaite.
2) vous prenez la pilule rouge et faites le choix d’ouvrir les yeux sur une réalité potentiellement dérangeante, qui peut changer votre vie comme celle de vos clients.
Dans ce cas, vous continuez la lecture de ce post en redoublant d’attention en essayant de faire fi de vos certitudes. Laissez-vous le temps de l’assimiler, avant d’en tirer vos propres conclusions : vous n’êtes pas dans Matrix, vous pourrez toujours avaler quelques cachetons bleus pour oublier…
La réalité
Si vous êtes encore là, c’est que vous avez choisi de prendre la pilule rouge : un choix qui, s’il est pleinement vécu, va irrévocablement (je l’espère) vous conduire dans une réalité plus difficile, mais assurément meilleure à terme pour vous et vos clients.
Contrairement à cette idée reçue et ancrée profondément dans le monde de la Tech : les besoins fondamentaux ne changent pas.
Il s’agit donc ici de comprendre les fondements de son propre métier ainsi que les besoins profonds des clients, et, si je devais le résumer en quelques points, ce serait ici, dans le périmètre de la prestation :
1) épargner aux clients le stress et l’insatisfaction.
2) lorsque c’est impossible : leur servir de bouclier.
3) éliminer cet état, après coup, le plus rapidement possible.
Je pourrais par ailleurs le résumer ainsi : au-delà de leur permettre de travailler sereinement, ils doivent pouvoir *ne pas travailler – sereinement* : c’est-à-dire profiter de leurs soirées, week-ends et congés en se disant que quoi qu’il se passe, ce sera géré de la meilleure manière possible.
Tous les critères évoqués en première partie et dans les contrats, ne sont au final que des outils ou des moyens pour arriver au véritable résultat attendu.
Ces outils et ces moyens, doivent rester au service des besoins profonds, et ne jamais devenir une fin en soi.
D’ailleurs, attardons-nous un moment sur l’un des outils qui peut être autant votre meilleur allié que devenir votre fossoyeur : les process !
Les process
La mise en place de process offre une multitude d’avantages : bien utilisés, ils peuvent améliorer l’efficacité, permettre une meilleure gestion des ressources ainsi que la mise en place d’une qualité de service constante et prévisible, ou encore assurer une meilleure scalabilité de l’entreprise (la liste est encore longue).
Mais, attention : les process ne doivent pas devenir une prison, ni une excuse pour ne pas résoudre les problèmes. De bons process, bien utilisés, vont probablement vous permettre de résoudre 80% des problèmes, de très bons process 90 %, et enfin d’excellents process assureront peut-être une résolution positive de 95 ou 99% des situations que vous allez rencontrer.
Pour autant, peu importe le taux : ce qu’il faut retenir, c’est que ce sera sur les fractions des pourcentages restants de ces situations que votre qualité de service sera réellement évaluée (jugée ?) par vos clients (n’oubliez pas que tous les clients ne s’expriment pas spontanément, et que la plupart des indicateurs, tels que les sondages au téléphone après avoir obtenu une réponse sont trompeurs).
Anecdote : Ceci me rappelle une histoire qui m’est arrivée il y a quelques années. À cette époque, voilà déjà un petit moment que j’avais repris, dans le cadre d’un partenariat entre Digital Network et OVHCloud, la gestion de MIS (Managed IT Services), une solution d’infrastructure managée conçue par OVH.
Dans le cadre de ce service, et contrairement à des solutions telles que StackX, le client y disposait d’un périmètre d’actions et de libertés très étendu : c’était notamment lui qui devait configurer ses vhosts, créer ses bases de données, ou encore devait assurer la gestion et la génération de ses certificats SSL Let’s Encrypt.
À ce moment-là, j’utilisais plusieurs critères (principalement une combinaison de mots clefs, du temps depuis lequel un ticket a été ouvert ainsi que du nombre et la fréquence des échanges dans ce dernier) pour détecter les difficultés et savoir sur lesquels je devais « zoomer ».
Je découvrais alors une série d’échanges se déroulant sur plusieurs heures, au sujet de la génération d’un certificat SSL Let’s Encrypt.
D’un côté, le client ne s’en sortait pas, et de l’autre, l’administrateur système le renvoyait en boucle et sans succès, à la documentation pour effectuer l’opération qui devait, en effet, contractuellement être exécutée par le client : tout ceci était prévu dans le contrat et le process…
Ceci illustre parfaitement ce que j’indiquais un plus haut… le moment où le process doit laisser sa place au profit du bon sens : « GɉNɉREZ-LUI SON PUTAIN DE CERTIFICAT !!!«
En effet, l’exécution de cette opération n’aurait pris que quelques secondes et aurait permis d’éviter non seulement une perte de temps considérable de part et d’autre, mais également un énorme sentiment de frustration et d’insatisfaction perçu comme une double peine par le client (d’un côté la frustration que l’opération ne soit pas exécutée, avec en parallèle l’énervement d’être traité comme un incompétent).
Le bon sens
Le bon sens est l’autre partie de la balance, l’élément qui doit assurer l’équilibre pour éviter que tout le système de confiance ne s’effondre.
Le bon sens est ce qui permet une prise de décision rapide et efficace, plus particulièrement dans les situations non prévues par les procédures, mais pas seulement.
Il va notamment permettre de s’adapter aux situations imprévues tout en conservant une approche pragmatique de la résolution de problèmes, assurant ainsi de trouver des solutions aussi simples que directes à des situations en apparence complexes.
Une communication efficace est la clef de l’excellence dans une relation client, et là encore, c’est le bon sens et non les règles et les procédures qui vont l’assurer :
Le client va peut-être parler de ftp pour demander l’ajout d’un vhost ou d’un environnement complet, de mémoire alors qu’il se réfère au stockage, de cryptage pour du chiffrement ou encore demander de « charger un SSL » alors qu’il souhaite générer un certificat Let’s Encrypt, pour lequel il aura probablement oublié d’effectuer la modification dns attendue, ou aura laissé trainer une entrée IPv6 qui devait disparaître…
Ce n’est pas à lui de savoir s’exprimer correctement dans le jargon adapté : c’est à nous, spécialistes de l’IT qu’il convient de « décoder » les demandes, de clarifier les attentes, et de les reformuler, si nécessaire, pour s’assurer de leur bon déroulement.
Le bon sens va ici permettre d’éviter la sur-complication et de renforcer la confiance : les clients ont une tendance naturelle à faire plus confiance aux personnes qui démontrent du bon sens, car cela leur suggère inconsciemment une meilleure capacité à prendre les décisions les plus judicieuses.
Enfin, le bon sens permet d’améliorer les conditions de travail en contribuant à abaisser le niveau de stress du client (on en revient aux fondamentaux du métier), tout en stimulant l’innovation et la créativité.
Conclusion
Je pourrais encore passer des heures à écrire dans ce post, jusqu’à en faire un livre, sans faire pour autant le tour complet du sujet. Mais, construire le meilleur service demande d’abord de sérieuses fondations ainsi qu’un alignement des objectifs entre le prestataire et son client qui doivent avancer tous les deux dans la même direction.
Chaque mois qui passe, le client doit être heureux de payer ce service, car la valeur perçue réelle reste supérieure ou égale à la dépense, tandis que de son côté, le prestataire et ses équipes doivent éprouver la même satisfaction à le délivrer en retour.
C’est sur ces fondations que reposent tous les services et produits que j’ai créés au sein de ScalarX. C’est également sur ces bases, finalement communes à de nombreux métiers, que je consacre un peu de mon temps à aider d’autres entrepreneurs lors de mes sessions de « Better Call Brain » pour améliorer leurs produits, leurs services et plus généralement assurer un meilleur développement de leurs entreprises.
Enfin, et au-delà du cliché, cette mini-vidéo de moins d’une minute 18 vous donnera déjà tous les axes de départ nécessaires à cette approche de la qualité. Pour le reste, et si cela ne vous suffit pas, vous savez où me trouver ;)
Christophe Casalegno
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